L'appel à veiller

Nous entrons aujourd'hui dans la période préparatoire à Noël : Avent. Il s'agit, pendant quatre semaines, d'éveiller en nous l'attente du jour de notre Seigneur Jésus. Dérivé du latin adventus, ce mot qualifie le retour du Christ à la fin des temps : Parousie. Avec l'Avent, nous relisons les évocations du premier avènement de notre Seigneur Jésus afin de nous préparer à son second avènement, c'est-à-dire à son retour. Pendant ce temps l'Eglise fait mémoire de la longue attente du Messie avant sa première venue pour éveiller en nos esprits et nos cœurs l'attente de son retour. Il s'agit d'une attente active et engagée comme les lectures proposées en ce premier dimanche de l'Avent nous y invitent. Nous partons de l'affirmation selon laquelle le Seigneur Jésus reviendra de la même manière que nous l'avons vu s'en aller (voir Ac 1, 11). Dans l'Evangile, l'Eglise « veille, à l'invitation de son maître, au sens où elle sait que ‘le jour de Dieu' approche et s'y prépare. Par le cœur, par le regard intérieur, par l'attention aux signes de Dieu, par le souci du prochain, en un mot par la vigilance, elle discerne la lumière au sein d'un monde de ténèbres et se rend capable d'y répondre. Le temps de l'Avent est la période par excellence de cette attente. Il y règne ‘le sentiment dans lequel l'Eglise de tous les âges doit maintenir sans cesse les siens : attente d'un certain future jusque-là différé, mais toujours imminent, futur tout proche en effet, car le passé en est le gage et le présent s'en nourrit à l'avance' ». Même deux mille ans passés, c'est chaque jour et maintenant qu'il faut veiller. Nous n'attendrons pas demain, nous n'attendrons pas Noël pour veiller car nous risquons d'être surpris. La situation dans laquelle la Covid-19 a plongé nos sociétés risque de nous détourner de cet appel à veiller. Ne nous laissons donc pas distraire et tenons-nous en éveil. Même si nous ne mesurons pas toujours ce que cette invitation à l'éveil signifie, n'oublions pas que Dieu a confié à tous ses enfants la gestion de sa maison. Ici notre rôle est double : il s'agit de dire Dieu au monde ou l'évangélisation et de dire le monde à Dieu soit l'intercession. Comme le maître peut venir à n'importe quel moment du jour ou de la nuit, le chrétien, le disciple doit toujours être prêt. C'est un appel à la veille et à la vigilance qui s'adresse à tous les baptisés de partout et de tous les temps. Jésus qui affirme sa proximité nous tient éveillés. Autrement dit, « veiller consiste… à renouer le contact avec Dieu, au cours des nos journées, ne serait-ce que par un refrain chanté… ‘Veiller' dans nos occupations quotidiennes… Jésus … nous a instruits par la comparaison du maître parti en voyage. Mais avant son départ, il a donné des instructions, comme nous le faisons en famille, avec les enfants, ou dans les entreprises… Le voyage est bien long, déjà plus de deux mille ans. Quand le maître reviendra-t-il ? Nous ne le savons pas, mais nous appelons si souvent au retour : ‘Viens, Seigneur, nous t'attendons'. Dans le temps présent, veiller, veiller pour nous, consiste à accomplir toutes les tâches qui nous sont confiées, mais de telle façon que nos familles, nos sociétés et notre entourage en tout lieu connaissent cette joie dont nous rêvons tant pour Noël, que ce soit au moins quelques instants, chaque jour ». Nos comprenons que veiller ne doit pas rendre craintif, mais prudent. Il suffit de choisir dans nos vies des petits moyens bien concrets pour nous maintenir éveillés. Cela passe par la prière, les sacrements, les services dans la charité, la solidarité, etc. Je termine en proposant pour notre méditation cet autre extrait de la dernière lettre de notre évêque (Tel un brouillard qui se déchire. Message pour ce temps de confinement dû au Coronavirus, p. 2-3) : « La pandémie entraîne de grandes souffrances et suscite de grandes peurs. Pour les personnes atteintes de la Covid, les souffrances se prolongent parfois et s'aggravent ; certains malheureusement y laissent la vie ; tous doivent se battre pour résister ; beaucoup, par bonheur, en sortent progressivement guéris. L'angoisse de la mort fait alors place à une grande joie, pour ceux qui sont ‘passés par la grande épreuve' et pour leurs proches qui les ont aidés. Les personnes contaminées vivent une grande solitude et une mise à l'écart ; certains éprouvent un sentiment de culpabilité. Sachons les contacter et les aider de notre mieux. Ceux qui ne sont pas malades de la Covid peuvent souffrir pour d'autres raisons. C'est spécialement le cas des familles, des jeunes et des personnes âgées. Les familles se retrouvent confinées et parfois désoeuvrées, ce qui suscite des tensions inattendues. Les jeunes sont privés de la sociabilité dont ils ont grand besoin et souffrent de la fermeture des écoles. Les personnes âgées se retrouvent davantage isolées et privées de visite, ce qui pèse sur leur moral. Les personnes précarisées deviennent plus pauvres. Les commerçants se retrouvent parfois sans revenu. De nouvelles pauvretés apparaissent. Pour les personnes qui accompagnent les malades, la tâche est rude et pénible. Le personnel hospitalier et médical est au maximum de ses forces et de ses efforts. Mais chacun de nous est aussi mis à contribution pour soutenir les malades de son entourage. Cela entame nos forces et pèse sur notre moral. Les prêtres, les diacres et les équipes de deuil, en particulier, sont en première ligne pour affronter ces situations et rencontrer les familles éprouvées. Les équipes d'aumônerie d'hôpital et de prison font un travail exceptionnel de présence là où c'est possible et consolent les malades par l'amitié et la prière. Elles le font au nom de l'Eglise… Pour tous ceux qui ont des responsabilités pastorales, le découragement ou la lassitude peuvent peser à certains moments face à l'ampleur des initiatives à prendre, au nombre de personnes à accompagner, aux célébrations à assumer (ou à ne plus assumer). Parfois, cela se reporte sur notre corps, sur notre sommeil, sur notre digestion, sur notre système nerveux, cela accentue nos faiblesses naturelles. Demandons au Seigneur de pouvoir supporter cela avec sa force et avec le secours de nos proches… Portons-nous les uns les autres dans l'expression de nos épreuves et portons dans la prière ceux d'entre nous qui sont dans la souffrance, en particulier nos aînés qui sont malades ou très âgés, ainsi que celles et ceux qui viennent de l'étranger. Pour chacun de nous la privation des célébrations, l'absence des réunions et la suspension de nombreuses activités vont tomber dur. On sera privé de sacrements, de communion, de liturgies. Il faudra reporter de nouveau des célébrations prévues. Cela est frustrant pour tous. Cela nous rappelle combien sont importantes nos rencontres quand nous avons la chance de pouvoir les vivre librement. Et combien l'esprit de communauté doit toujours être travaillé ». Je souhaite à vous tous beaucoup de courage pour traverser cette période difficile. Vivons dans l'espérance des jours meilleurs et mobilisons-nous pour cela. Une belle et sainte nouvelle année liturgique. Profitons de ce temps de l'Avent pour vivre une nouvelle et véritable conversion des cœurs à l'amour de Dieu sans condition.

Fulbert Mujike

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